En continuité de la session 1, “ Imaginer et construire des établissements à l’ère du numérique”, Pascale Luciani-Boyer, AMF/CNN, animait le mardi 27 août cette session du séminaire collectivités territoriales à Ludovia, intitulée : « Aménager et faire vivre des établissements à l’ère du numérique ».
Autour d’elle, deux intervenants : Pascal Bringer, Agrégé de SVT et co-fondateur de la société Maskott, et Jean-Paul Moiraud, professeur de gestion au Lycée La Martinière Diderot de Lyon qui, grâce à des retours d’expérience, nous ont projeté, le temps d’une session, dans les méandres d’une école connectée et décloisonnée…
Permettre aux enfants de manipuler le tactile sur des parcours pédagogiques
A travers la présentation du projet TACTILEO, réponse de la société Maskott à l’appel à projet du ministère en 2012, Pascal Bringer nous plonge dans un univers, que Jules Vernes aurait pu imaginer pour nous en son temps, pourtant aujourd’hui technologiquement accessible et concret.
Grâce à l’infrarouge, les objets sont reconnus et deviennent interactifs et tactiles, toute projection devient possible sur tout support : la surface peut interagir avec le reste. Voir Tactileo en image
La salle informatique n’est plus d’actualité. Le numérique est partout, dissociant nos repères traditionnels : la salle devient polyvalente et nous immerge dans un nouvel espace, optimisée et augmentée au fil des technologies.
Dans des lieux connectés et décloisonnés, toute salle peut alors être adaptée aux besoins du moment. On se construit de façon hybride tant dans l’espace d’apprentissage dédié qu’en dehors ou dans ses déplacements.
De l’apprentissage des connaissances à celui des compétences
Autre expérimentation présentée par Jean-Paul Moiraud : la simulation virtuelle qui permet aux élèves ou étudiants de passer de l’apprentissage des connaissances a celui des compétences.
Dans le cadre d’une simulation virtuelle, on a mis des étudiants en situation d’urgence, afin de leur permettre de s’entraîner et se projeter dans une réalité augmentée.
Cette expérimentation a fait prendre conscience de l’importance tant pour les élèves que pour les enseignants d’une mise en situation de compétences en prolongation des simples connaissances dont on se contentait avant, mais qui restent aujourd’hui insuffisantes.
Pour Jean-Paul Moiraud , l’école de demain devra impérativement donner à l’élève, grâce à des outils de virtualisation, les moyens de passer de l’acquisition des connaissances à celle des compétences, grâce à un tuteur qui le guide, selon ses besoins.
A partir de ces deux retours d’expérience, et dans une société connectée en permanence, JPM pose le problème des normes juridiques du travail de l’enseignant liés aux unités de temps et de l’espace.
L’enseignant peut travailler et préparer ses cours mais aussi se former à distance à l’école comme chez lui :
le temps architecturale et le temps pédagogique n’évoluent plus de la même façon. Une zone grise juridique apparaît.
La perruque inversée, métaphore du temps de travail numérique des enseignants
« Le numérique fait voler en éclat les murs de la classe en abolissant les contours traditionnels de l’espace éducatif. De très nombreux enseignants lancent des expérimentations dans leurs classes, par conviction personnelle du potentiel pédagogique des fonctionnalités des outils numériques ou dans le cadre d’expérimentations institutionnelles. La réflexion pédagogique avance mais … les champs connexes (L’analyse institutionnelle, les conditions de travail, la réglementation …) sont les grands absents ».
Même si l’enfant peut être élève à l’école comme à la maison, car dans notre société le temps de l’enfant est normé, celui de l’enseignant devient élastique.
Pour illustrer son propos JP cite l’exemple de la « perruque inversée comme métaphore du temps de la structure du temps de travail des enseignants ». Il présente sa théorie dans son blog ici
Le travail en perruque est un usage développé dans les ateliers des entreprises industrielles. Le salarié utilisait le temps de travail rémunéré (donc normalement consacré à l’employeur) pour se consacrer à des pratiques personnelles. Michel De Certeau parle de subversion du temps.
À l’heure du numérique on inverse le principe (c’est en tout cas la position que je défends), les salariés occupent une partie de leur temps libre au service de leur employeur (ce temps va en s’accroissant). On passe de pratiques de subversion à des pratiques de « soumission« . Les philosophes parlent de servitude volontaire.
Concrètement comment devra-t-on juridiquement inscrire le temps de l’espace numérique ?
D’autant que le statut de l’espace privé de l’enseignant se posera des la rentrée avec les 9h de formation a distance, que l’enseignant pourra effectuer à l’école comme chez lui.
Question abordée dans le monde de l’entreprise avec le télétravail mais qui n’a pas encore été abordée pour le travail des enseignants.
Article rédigé par Marie-France Bodiguian, Cabinet AMO-TICE